Arthroscopie : passé et futur

Henri Dorfmannpar Henri Dorfmann,
Fondateur et 1er Président de la SFA

Mon aventure personnelle débute en 1969.
Alors qu'ARMSTRONG pose le pied sur la lune, je débarque dans le monde nouveau du Tokyo Teishin Hospital, dans le Service du Professeur WATANABE.

Comment j'arrive là ?

Il faut d'abord remonter à la première arthroscopie attribuée à TAKAGI (le maître de WATANABE) faite à l'aide d'un cystoscope en 1918, pour arriver à l'époque du premier grand saut de la technique qu'on peut attribuer à WATANABE, véritable pionnier de l'arthroscopie moderne avec la création de son arthroscope n°21 en 1958, alors qu'il avait publié son premier atlas en 1957. Il faut mentionner aussi le travail de quelques pionniers :

Aux Etats Unis, le premier article paraît en 1925 sous la signature du Docteur KREUSCHER : "de l'intérêt de la reconnaissance et du traitement des lésions méniscales" . Il faut surtout mentionner et retenir l'important travail de BURMAN et son équipe avec, en particulier, la publication en 1931 dans le JBJS d'un article concernant l'exploration de toutes les articulations.

En Europe, le Suisse Eugène BIRCHER publie en 1921 un article sur l'arthro-endoscopie; en Allemagne, on retrouve les publications de SOMMER et de VAUBEL en 1937 et 1938, et en 1955, dans la Revue d'Orthopédie, HURTER de Strasbourg publie un article qui n'aura pas plus d'écho que la courte communication de R.M. IMBERT rapportée dans le Marseille Chirurgical de Mai Juin 1956.

A la fin des années 60, plusieurs équipes rhumatologiques s'intéressent à l'arthroscopie : JAYSON et DIXON publient en 1968 le rôle de l'arthroscopie du genou dans la pathologie rhumatismale . ROBLES GIL et KATONA ont revu 80 arthroscopies, à propos de leur intérêt diagnostique et pour la recherche, lors du 4ème Congrès de Rhumatologie panaméricain en Octobre 1967. Plus tard, c'est GOMES et BONOMO (1972) (Brésil), LESLIE et BENTLEY (1978) (GB) qui publient sur l'arthroscopie.

L'année 1969, (outre mon arrivée à Tokyo) est surtout marquée par la deuxième édition de l'Atlas d'Arthroscopie de WATANABE. On peut déjà mesurer à ce moment là le progrès réalisé depuis le premier atlas où les images sont peintes à la main, et ce deuxième atlas où, grâce à l'arthroscope n°21, il existe maintenant des photos.

Quelle est la situation quand je m'insère dans ce petit milieu ?

Il y a, à côté des noms déjà cités, un certain nombre de gens, dont j'ignore l'existence à ce moment là, mais qui vont apparaître comme des personnages importants, ainsi R.W. JACKSON a pu s'initier auprès du Pr WATANABE dès 1964, ou Richard O'CONNOR qui, lui aussi, va venir le voir en Février 1971 ; nous reverrons leur rôle plus tard.

Dans le Service de WATANABE, on travaillait avec des arthroscopes n°21, composés d'une gaine, avec un trocart permettant la mise en place, d'un porte lampe (constitué d'une petite lame, avec comme son nom l'indique, une ampoule à son extrémité) et d'un télescope s'emboîtant dans l'ensemble de ce système. Essentiellement un télescope à vision directe, mais il existait également un télescope à vision à 90°. Le matériel était stérilisé aux vapeurs de formaldéhyde dans un petit ensemble plastique avec des étagères (figure 2). Cette désinfection durait 12 à 24 heures. Ce matériel, qui représentait déjà un énorme progrès, était cependant source de certains ennuis : d'abord il fallait toujours vérifier que l'ampoule était bien vissée, car il y avait un risque de la perdre dans l'articulation. Mais il pouvait arriver pire : que cette ampoule soit cassée dans l'articulation …. IKEUCHI raconte cette anecdote, mais elle m'est aussi arrivée personnellement !!! Il pouvait arriver également que ce porte lampe se rompe sur son élément métallique (figure 3). Tout cela était à l'origine de corps étrangers pouvant nécessiter l'arthrotomie. Les contacts entre le fil électrique et l'arrivée sur le porte lampe étaient souvent interrompus par un effet isolant provenant de dégradation due aux vapeurs de formaldéhyde. Il existait un système de survoltage, sorte de flash , permettant la prise de photos. Le format rendait en fait difficile la vision dans de grandes salles, ce que j'appris à mes dépens lors d'une présentation au Congrès de Rhumatologie de Prague en 1973. Le budget du Service ne me permit de rapporter qu'un arthroscope que Mr FUKUYO me remit en grande pompe en présence du Pr WATANABE. Au retour, comme je n'eu droit (après bien des palabres) à la salle d'op. du Service de chirurgie générale qu'une fois par semaine, il fallut, compte tenu des délais de stérilisation, se réapprovisionner en scopes. Les droits de douane firent un obstacle qui obligea le recours au système "D", mais j'obtins à partir de Bale, avec l'aide du Laboratoire Geigy, plusieurs arthroscopes. A la retraite du chef de service, le nouveau, un « viscéral pur et dur » me dit qu'il ne voulait plus d' « os » chez lui, et me met à la rue. Il fallut plusieurs mois pour que le Professeur WITVOET me recueille à Saint Louis dans sa petite salle septique (Cloquet). Ceux qui sont passés dans le service s'en souviennent.

Enfin, il faut surtout rappeler que, pour l'enseignement, les choses n'étaient pas simples. L'enseignant maintenait l'optique dans la situation de ce qu'il avait vu, et décrivait à l'étudiant ce qu'il devait ensuite regarder après que l'enseignant ait dégagé son œil de l'arthroscope, sans avoir bougé. Inutile de vous dire que le moindre mouvement entraînait une vision très différente de la description et une perte de repère souvent décourageante. Progressivement les conditions d'enseignement s'améliorent avec la création de ce qu'on appelle un « teacher » . D'abord un « teacher » fixe à deux branches, surtout prévu au départ pour mettre une caméra permettant de filmer pendant que l'on continuait à regarder par la deuxième branche, mais qui devait s'avérer être un instrument d'enseignement utile. Beaucoup plus tard, dans le milieu des années 1970, il est remplacé par un « teacher » long. Celui-ci, plus maniable est constitué d'un bras à plusieurs segments mobiles, permettant alors un suivi en direct par l'étudiant du geste de l'opérateur et permettant de la même façon de filmer dans des conditions plus faciles.

En 1970, deux équipes rhumatologiques parisiennes (celle de l'Hôpital Lariboisière et celle de l'Hôpital Cochin), sont obligées d'attendre le numéro spécial de Noël de deux revues concurrentes, la « Semaine des Hôpitaux », et la « Presse Médicale », pour pouvoir publier leurs photos en couleur. A cette époque en effet, les photos couleur étaient l'exception et nécessitaient ce que l'on appelait des « planches couleur hors texte » qui ne se faisaient qu'une fois par an. Ceci explique que les deux publications soient sensiblement concomitantes, en Décembre 1970. Mon article dans la Semaine des Hôpitaux du 20 Décembre 1970 s'appelait " Arthroscopie du genou : état actuel de la question " tandis que l'article de Madame TESSON s'intitulait " L'arthroscopie du genou : techniques, indications et résultats" paru dans la Presse Médicale du 26 Décembre 1970. Mon article, sous l'influence de mon maître WATANABE, insistait déjà, à côté des affections purement rhumatologiques, sur un certain nombre de problèmes mécaniques et sur les premiers gestes thérapeutiques. Il parlait non seulement des possibilités d'extraction des corps étrangers, mais aussi des méniscectomies dont WATANABE avait fait la première en 1962, et dont son assistant, IKEUCHI, développa la technique en 1967. J'avais eu la chance, à la fin de mon séjour, qu'ils me remettent une copie du film qu'ils avaient réalisée en 1967 et qu'ils avaient montrée dans un certain nombre de congrès japonais et nord-américains.

Il est bien évident que ces deux publications, en Français, dans des revues générales, n'ont eu aucun impact ni écho. Pas plus que mes communications suivantes dans la Semaine des Hôpitaux : 1972 " Nouvelles observations sur l'arthroscopie du genou" , ou en 1974 sur "L'intérêt de l'arthroscopie devant une monoarthropathie isolée du genou ". En 1974 le monde orthopédique m'entrouvre sa porte lors des Journées de Chirurgie du genou de l'Hôpital Bichat sur "l'Arthroscopie du genou. Méthodes et indications, intérêt pour l'étude des lésions méniscales " et la même année à l'Hôpital St Pierre de Bruxelles j'expose "L'arthroscopie du genou" . Plus tard encore, je m'exprime chez les radiologues, via le GETROA, en 1975 :" Arthroscopie du genou. Apports particuliers de la méthode ", puis en 1980 dans un face à face avec B. MALDAGUE sur "Arthrographie-Arthroscopie du genou" (c'est encore l'époque de l'affirmation difficile du rôle diagnostique de l'arthroscopie).

On peut dire en fait que c'est la mise en route du rouleau compresseur nord-américain, qui démarre avec la publication de deux grandes séries : celle de CASSCELLS dans le JBJS de 1971, et la série de JACKSON dans le JBJS de 1972, qui marquent le vrai début de la diffusion mondiale de l'arthroscopie. Même si en 1973 c'est encore les rhumatologues qui, à l'échelon international, se distinguent lors de leur XIIIème Congrès à Kyoto en acceptant que j'expose les "Résultats d'une enquête prospective sur les monoarthrites " et que la maison SHINKO OPTICAL présente sur son stand l'arthroscope de WATANABE.

Evolution du matériel

Parallèlement, le matériel va lui aussi beaucoup évoluer. Dès 1960, STORZ avait introduit la lumière froide puis les optiques forobliques. Il n'avait pas pris de brevet, et différents concurrents vont finalement faire avancer les arthroscopes. Les arthroscopes du début des années 1970 que STORZ fabriquait comportaient une petite pince à biopsie dans une gaine située au-dessous de l'optique. Cet instrument était peu maniable et fragile. Le seul avantage était qu'on quittait la vision directe pour la vision foroblique. C'est celle que vous connaissez aujourdhui et qui élargit le champ de vision par rotation du scope sur lui-même. Compte tenu des reproches faits déjà à l'arthroscopie: "pourquoi regarder par un trou de serrure quand on peut ouvrir la porte " comme le rappelle R.W. JACKSON, il paraissait souhaitable de ne pas faire un deuxième trou. Le premier arthroscope, dit opératoire, est conçu par O'CONNOR en 1974. Il procédait toujours du même principe : introduire scope et instruments par un seul trou, ce qui s'avèrera peu confortable, et cet instrument fut peu développé. Pourtant, dès 1950, WATANABE se sert d'une deuxième gaine pour faire des biopsies, en 1955 il résèque une SVN localisée, et en 1961 il pratique l'ablation d'un corps étranger.

Finalement, cette notion de triangulation qu'il a développé dès 1955 apparaît la plus efficace malgré la nécessité d'un deuxième trou. Ceci permet d'abord des gestes simples, comme l'ablation de corps étrangers, et surtout le remplacement d'une simple aiguille par un palpateur, tel que vous le connaissez aujourdhui. Les étapes suivantes sont marquées par l'apparition du travail sur écran de télévision. D'abord rèalisé par des équipes comme celle de L.L. JOHNSON, avec une caméra fixe reliée au scope par le « teacher ». Cette équipe utilise un scope de petit taille dit Needelscope. Puis progressivement vont apparaître des micro caméras qui n'ont, au départ, rien de la taille de celles d'aujourdhui. Les premières que nous avons personnellement connues à la fin des années 1970 pèsent 600 à 700 g. Elles ne sont naturellement pas trempables. On doit les habiller. Puis sont apparues les micro caméras que vous connaissez.

En ce qui concerne le matériel opératoire lui-même, les premiers instruments sont volontiers fragiles, avec en particulier un risque de rupture autour des axes, surtout pour les ciseaux. D'autre part ces ciseaux, pointus au bout, sont dangereux. Puis progressivement s'est développée toute la palette que vous connaissez de pinces à saisir de meilleure qualité, la disparition quasi-complète des ciseaux autour d'un axe, remplacés par des ciseaux rotateurs, et aussi le développement de baskets évitant ce problème de la pointe acérée. Se sont également développés les instruments motorisés : les premiers, certes moins puissants que ceux dont vous disposez aujourdhui, n'en sont pas très différents. Le problème des pompes, indispensables dans certaines situations, souhaitées par certaines équipes de façon plus systématique, apparaissent dès le milieu des années 80. L'introduction du laser n'a pour le moment pas apporté les bouleversements que certains espéraient. Même si en 1981, lors du Congrès de L'IAA de Rio, le travail de T. WHIPPLE et celui de GLICK se partagèrent un premier prix bien mérité.

International Arthroscopy Association

Le développement de l'IAA fut certainement un facteur très important de diffusion et de connaissance de l'arthroscopie. Créée en 1974, à l'occasion d'une rencontre à Philadelphie, j'y fus, sur proposition de mon maître WATANABE, admis comme l'un des 70 membres fondateurs. Elle tint son premier congrès en 1975 à Copenhague et élut comme premier président, naturellement, le Professeur WATANABE. Sur son chemin de retour, j'eus le plaisir et l'honneur de le recevoir à Paris. Les travaux de cette réunion furent rapportés dans un numéro spécial d'une revue rhumatologique qui s'appelait "R" (entièrement dans la mouvance du Pr.Delbarre), de diffusion extrêmement limitée et qui a même disparu depuis. L'article de Cochin faisait état de l'expérience française (la leur exclusivement ! cf bibliographie de l'article ne citant ni HURTER ni moi-même) sur 10 ans (1969, date du séjour de Me TESSON àTokyo-1975, date du congrès! ). La réunion suivante eu lieu en 1978, dans le cadre de la SICOT à Kyoto. Le Professeur WATANABE fit un état des lieux de l'arthroscopie, comme j'essaie de le faire aujourdhui. Sur sa recommandation, j'entrais au Conseil dAdministration. Mission que j'accomplis avec mes faibles moyens pendant 5 ans. En 1981, toujours dans le cadre de la SICOT, la réunion de l'IAA se tint à Rio de Janeiro. Il fut décidé là de se rapprocher de l'International Society of the Knee. Les congrès se tinrent donc en même temps, soit tous les deux ans, jusqu'en 1989 à Rome, où malgré l'opposition de la Belgique et de la France, l'IAA se fusionna à l'ISK pour devenir l'ISAKOS. Depuis, grâce aux efforts des présidents successifs de la SFA, cette incartade a été oubliée, et c'est A. FRANK* qui nous représente au bureau tandis que P. BEAUFILS** est au bureau de l'ESSKA.

Le nombre de publications, conférences d'enseignement et congrès, augmenta de façon exponentielle à la fin de ces années 1970 et au début des années 1980. Quelques uns des noms marquants de cette époque vous sont probablement connus : L .JOHNSON, R.W. JACKSON, McGINTY, METCALF, GUHL, GLICK, …, en Europe, VAN REENS, GILLQUIST, ERIKSSON, …Dans cette débauche de cours, tout le monde se promène et se rencontre beaucoup, mais cette communication tout azimut porte ses fruits. L'arthroscopie explose, les Sociétés se multiplient. Votre serviteur s'exprime à Cambridge, Toronto, Québec, Nimègue, Bermudes, en Caroline du Sud, … Dès 1976, JACKSON et DANDY publient une monographie sur l'arthroscopie du genou. En 1977, L. JOHNSON publie un important livre sur le diagnostic et la chirurgie arthroscopique, la même année O'CONNOR publie le sien, tandis qu'en 1978 WATANABE publie la troisième édition de son atlas y incluant les autres articulations que le genou. Les livres vont se multiplier : en 1979 W.GLINZ de Zurich publie en allemand sur l'arthroscopie du genou. En 1980 idem pour HENCHE, un Allemand qui publie (en anglais), puis pour DANDY en 1981. EIKALAR publie en 1975 sa thèse sur l'arthroscopie du genou à Groningen (Pays Bas).

Le changement d'image et la reconnaissance progressive de l'arthroscopie apparaît à travers ces quelques publications, choisit entre 1978 et 1988 montrant d'abord le doute quand à sa valeur diagnostique, puis sa reconnaissance à titre thérapeutique, elle devient même référence à l'apparition de l'IRM tandis que son emploi s'étend aux autres articulations.

A côté de tous ces éléments écrits, l'enseignement a donc été facilité, comme nous l'avons vu, par le passage de la vision optique directe, au « teacher », puis surtout à la micro caméra, permettant déjà un apprentissage théorique en suivant les opérateurs de façon plus aisée que la façon primitive. Différents modèles d'articulations pour s'entraîner ont été proposés, pas toujours parfaits, mais d'accessibilité plus simple que les études sur cadavres, comme j'en ai faites moi-même pendant un an, surtout avec l'arthroscope de WATANABE qui était quand même relativement encombrant.

Enfin il faut naturellement mentionner la création de la revue ARTHROSCOPY en 1985 qui va progressivement recueillir l'essentiel des articles mondiaux sur le sujet.

SFA

Les débuts furent difficiles, dans l'indifférence pour ne pas dire l'hostilité de l'establishement en particulier des Maitres Universitaires. Il n'est d'ailleurs pas inutile de rappeler que l'arthroscopie s'est développée hors de l'université pour ne pas dire contre elle pendant de très nombreuses années. Nous verrons pas à pas ce que la SFA a fait et où nous en sommes aujourd'hui.

Une première réunion informelle à eu lieu à Strasbourg à l'automne 1980 à l'initiative de J.Y.DUPONT. Il joua un rôle important en particulier par le pole Ambroise Paré qui éveilla l'intérêt de nombre d'orthopédistes. Parmi eux, inutile de mentionner deux de ces émules: Ph. BEAUFILS et A.FRANK. Le congrès fondateur date du 12 Novembre 1980 à Paris, en présence de ses 20 membres (dont 2 agrégés qui bien que non arthroscopistes de fait nous ont apporté une caution amicale) . Il adopte les statuts et définit les buts de l'Association. Il réalise ainsi les vœux de Valenti CONTI qui, dès 1978, m'avait poussé sans succès à la création d'une telle association (et qui sera responsable du premier symposium provincial à Marseille). Nous avons alors décidé de nous réunir deux fois par an, une fois en province au printemps, et une fois à Paris en décembre (tableaux).

A partir de 1990, seule la réunion de Décembre a été maintenue, avec toujours une alternance Paris-Province. Nous avons cherché à couvrir le maximum de régions. Les comptes-rendus de nos premières réunions ont d'abord été publiés dans un supplément du Journal de Médecine de Lyon (entre Octobre 81 et Septembre 91 : 11 publications).Les délais de parution sont trop longs, avec des retards de publications qui nous incitent à changer . Début 91, A.FRANK et B.LOCKER sont mandatés pour créer une monographie publiée par nous-mêmes. Il en sera ainsi pendant trois ans (1991 à 1993). Puis, dernière étape, cette monographie, toujours dirigée de main de maître par A.FRANK est éditée et vendue par la Société SAURAMPS à partir de 1994.

D'emblée, notre Société s'est intéressée à une coopération internationale. C'est ainsi que dès 1982, nous avons invité des orateurs étrangers à nos réunions annuelles. En 1984, le cours de l'IAA que j'ai organisé à Paris avec toute la SFA a été très important : il a augmenté notre notoriété, notre attractivité, c'était la première grande réunion en France avec les meilleurs conférenciers du moment et plus de 400 participants ce qui paraissait énorme pour l'époque. Plus tard, un grand nombre de nos sociétaires ont participé à des réunions en Europe et hors d'Europe. Nous avons fait aussi des réunions communes avec des Sociétés étrangères, à Bruges avec la Société Belge en 1985, à Paris avec la Société Suisse en 1989. Et nous participerons en 2000 à la réunion de la Société Espagnole à San Sebastian.

En ce qui concerne l'enseignement, après quelques cours épisodiques débutés par des membres de la SFA : Octobre 1981 (MOYEN) et Septembre 1983 Lyon(MOYEN IMBERT), Avril 1986 Caen (LOCKER - BEGUIN), nous avons créé un cours régulier de la SFA avec l'aval et le label du Collège des Chirurgiens Orthopédistes. En 1989 et en 1990 uniquement un cours de base, puis à partir de 1991 un cours de base et un cours avancé, répartis sur trois jours. Puis, le temps aidant, une coopération institutionnelle s'est créée avec l'Université sous forme d'un Diplôme Inter-Universitaire, et de ce fait nous avons supprimé nos cours de base, mais maintenu nos cours supérieurs, comme cette année toujours avant notre réunion annuelle. Le premier diplôme délivré en 1996 par les trois Universités fondatrices voit sa reconnaissance augmentée par l'addition de nouvelles facultés. Cette année, 17 Universités sont concernées par ce DIU. Initialement, chaque étudiant inscrit aux cours de la SFA, puis au DIU recevait une monographie régulièrement mise à jour. Cette année est marquée par la publication de notre livre, fruit d'une coopération active de 70 auteurs, et surtout du travail constant et de la ténacité de notre coordonnateur principal : André FRANK.

Je ne m'étendrai pas sur le développement du fellowship depuis 1996 avec l'AGA dont on semble apprécier l'intérêt dans les deux sens. Je voudrais dire un mot de l'admission dans notre Société, dont la croissance a été volontairement limitée au départ, avec des critères d'admission très sévères. Actuellement, avant notre Assemblée générale, il y a 144 membres titulaires et 183 membres associés dans notre Société. Ce contrôle volontaire du développement, le travail de chacun de ses membres, la valeur de ses réunions ainsi que de son enseignement, ont permis une reconnaissance progressive de la SFA. D'abord par le Collège des Chirurgiens Orthopédistes comme nous l'avons vu, puis l'année 1994 a été faste par notre présence "es qualité" au "Quoi de neuf "en arthroscopie à la SOFCOT et à la Conférence de Consensus sur l'arthroscopie du genou.

Je vous ai déjà mentionné le DIU et la coopération internationale, ainsi que la présence de deux de nos anciens Présidents à des postes importants de Sociétés internationales. Maintenant il me paraît intéressant de regarder quelques uns de nos thèmes de symposium et de parcourir quelques sommaires*, car nous avons là, me semble-t-il, un des meilleurs reflets de l'évolution de l'arthroscopie, non seulement en France, mais en général.

Notre première réunion scientifique a cherché à déterminer un langage commun entre des intervenants d'horizons très différents, et ceux qui étaient là s'en souviennent peut-être, même si aujourdhui ces discussions de "Sorbonnards "peuvent prêter à sourire. De même l'année suivante, la discussion à propos du matériel qui avait encore de gros progrès à faire, comme nous l'avons vu.

En 1983 se place la première étude coopérative qui est, à mon avis, l'une des forces de notre Société, à condition que cette œuvre collective soit toujours reconnue et utilisée comme telle, ce qui, à de rares exceptions près, a toujours été le cas, et naturellement il appartient au bureau de la Société de veiller au maintien de cet esprit.

En 1984, nous en sommes encore à l'arthroscopie dans la suite de la chirurgie du genou. En 1985 on quitte le genou pour la première fois pour parler de l'épaule. En 1986 on commence à parler du genou dégénératif et en 1987 des limites et échecs de l'arthroscopie du genou.

Au travers des communications libres, on voit d'abord de nombreux exposés à propos des problèmes techniques, puis on va beaucoup parler des plicae, ensuite c'est la valeur de l'arthroscopie dans les accidents aigus du genou qui pose question. On voit que c'est aussi la valeur diagnostique même de l'arthroscopie qui a besoin d'être reconnue. Dans ces années 1981-82 on voit apparaître l'intérêt de la méniscectomie. En 1983, deux nouveaux thèmes : l'arthroscopie de hanche et les premiers pas vers la ligamentoplastie sous arthroscopie. En 1984 on débat de la question qui s'est à nouveau posée récemment avec le développement de l'IRM à propos de l'ostéonécrose du condyle fémoral et la méniscectomie, mais aussi du traitement du kyste méniscal par arthroscopie seule. Mentionnons les discussions sur la ligamentoplastie artificielle. En 1987, vous avez là l'influence des rhumatologues dans notre Société qui explique bien ce thème sur les monoarthrites ; ce qui n'est pas le cas à l'étranger ou malgré de rares tentatives comme celle d'ARNOLD et KALUNIAN de Chicago ils sont (en particulier aux USA) hors jeu. Au sommaire* de 1990 on voit que le champ de l'arthroscopie s'est élargi, avec des sujets sur la cheville, le poignet, l'épaule, la synovite villo-nodulaire, la suture méniscale. Mais il s'agit des réunions de 1988, et en raison de ces deux ans de retard, nous nous décidons donc à un nouveau type de publications comme je vous l'ai dit. Les thèmes des symposiums marquent une évolution à dix ans par rapport aux premiers thèmes. Par exemple en 1992, on en est aux résultats des réarthroscopies ou ceux des méniscectomies externes avec des reculs plus importants. En 1992 le thème principal est le genou après 50 ans avec 14 intervenants sous la direction de Th. BOYER. Vous notez aussi la première présentation du Score Cartilagineux de la SFA et le résultat d'une enquête épidémiologique coopérative sur le ménisque interne sur genou stable rapporté par A.FRANK grâce aux réponses de 57 membres. Il y a aussi 3 ateliers dont vous pouvez lire les thèmes sur notre site. Je ne m'étends pas sur les sommaires de 1993, 94 et des années suivantes. Je mentionnerai quand même plus particulièrement en 1996 l'importante étude coopérative sur les résultats des méniscectomies sur genou stable avec un recul de dix ans. Vous connaissez la structure actuelle de nos réunions : une série de conférences d'enseignement, un ou plusieurs symposiums toujours basés sur les études coopératives, et les communications libres (avec parmi elles une présentation de chacun des "Fellows"), les vidéo-flash.

Grâce à la SFA, l'arthroscopie s'est largement répandue à travers la France et a pénétré maintenant le cursus des études médicales. La Société elle-même, et un grand nombre de ses membres actifs, participent à des études coopératives et à des recherches au sein de notre Société, mais aussi au sein de Sociétés étrangères.

Le futur de l'arthroscopie

Je pense qu'on peut reprendre la phrase de conclusion de notre ami J.P. DUBOS dans l'historique qu'il a fait dans notre livre d'arthroscopie " à l'aube du nouveau millénaire, on est en droit de penser que l'arthroscopie conservera une place de choix, si ce n'est la première, dans l'arsenal des techniques orthopédiques ". Mais sous quelle forme ? Il y a des pistes avec des tendances générales, et l'espoir du passage de plus en plus de gestes d'exérèse à des gestes de réparation. Jusqu'où iront ces possibilités de réparation ? Elle ne tiennent probablement pas de la seule technique arthroscopique. Elles dépendront certainement des avancées de la science médicale et de la technologie de front. Je pense tout particulièrement au cartilage. Il est probable que les années à venir devraient permettre des réparations du cartilage comme cela vous a été exposé hier. L'arthroscopie devrait permettre une meilleur connaissance de certaines pathologies (ex: pathologie du bourrelet de hanche...) et se développer en dehors des articulations. Les tunneloscopies dont le canal carpien a été le premier exemple, se développent à différents niveaux. L'endoscopie rachidienne dont les premiers essais il y a une quinzaine d'années avaient entraîné plus de réserve que d'adhésion, semblent maintenant suivre un rail plus sérieux, avec des développements qui me paraissent intéressants et d'avenir. Qu'en sera-t-il réellement des possibilités du laser ? Philippe HARDY répondra probablement mieux à cette question que je ne peux le faire. Mais il est quand même probable que, malgré une avancée assez lente, des possibilités restent en perspective. Que penser du développement en 3 D, de l'utilisation des images virtuelles, et même des robots ? Je n'ai pas les capacités de Jules Verne à le prédire.

Si les pronostics précis dans le domaine scientifique sont quand même difficiles, je voudrais reprendre la phase finale du discours que j'avais prononcé lorsque j'ai quitté la présidence en 1990. "Je souhaite aussi que lors du 20ème anniversaire de notre Société, le Président de l'époque puisse faire un bilan encore plus positif et constater le bien-fondé de nos efforts". Il me semble qu'en effet Henry COUDANE, le Président d'aujourd'hui, et celui de tout à l'heure peuvent acquiescer à ce qui n'était alors qu'une prévision, et je souhaite que, pour les autres prévisions que j'ai pu faire dans le domaine scientifique et de la vie notre Société, elles se réalisent dans les années à venir dans l'intérêt et le bien de tous.